Article: L’Échappée Belle, une première rencontre avec la montagne.

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photo : Bruno Lavit

Au sein d’une année particulièrement étrange, je me suis présenté le 22 août 2020 au Pleynet pour prendre le départ à 4 heures du matin de l’une des épreuves de l’Échappée Belle.

Son nom : La Traversée Nord. Un parcours qui s’étend du Pleynet à Aiguebelle en empruntant 87 kilomètres de sentiers très techniques et caillouteux au sein du massif de Belledone, tout en cumulant pas moins de 6140 mètres de dénivelé positif et 7560 mètres de dénivelé négatif.

Récit d’une première à courir dans les sommets.

Préparer le Grand Raid

2020 représentait et représente toujours au jour d’aujourd’hui (au moment de cet article, nous sommes toujours dans l’attente de la décision concernant le maintien) un énorme objectif, à savoir la Diagonale des Fous en octobre.

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Pour me donner toutes les chances de réussir ce pari, il était nécessaire de prendre un peu d’expérience dans le décor montagnard. Au travers de blocs. Mais aussi lors d’une course afin d’acquérir quelques repères et me familiariser au mieux avec de forts dénivelés.

Mes premiers choix avaient été la CCC à Chamonix, où mon nom n’est pas apparu lors du tirage au sort, et le Grand Raid des Pyrénées qui n’aura malheureusement pas pu survivre à la situation sanitaire.

S’est alors présentée l’opportunité de prendre un dossard sur l’Échappée Belle, un évènement autant réputé pour sa beauté que sa difficulté. Un tracé qui se veut légèrement effrayant, mais que j’ai décidé d’affronter en cette fin du mois d’Août.

Départ calme et masqué

Nous étions donc une centaine, sur les 500 participants, à attendre le top départ au sein cette douce nuit estivale. Une centaine car nous sommes parti par vagues (1 toutes les demi heures et je me situais dans la première) afin de nous adapter au protocole de l’évènement pour respecter les règles sanitaires liées au COVID.

Je me sentais un peu comme un intru au milieu des Mimmi Kotka, Hillary Allen et autres participants, car contrairement à eux je suis parti sans bâtons. Un accessoire bien utile sur ce type de terrain. Pourquoi ce choix ? Tout simplement car à La Réunion son usage sera interdit. Je concède également que pour le moment je ne sais pas m’en servir de toute façon.

Après un réchauffement d’ambiance par le speaker, le défilé de coureurs masqués s’est élancé, dessinant un bal de frontales au milieu de la pénombre. Pour ma part, je me suis mis de suite dans ma bulle pour ne pas me laisser embarquer, et respecter le plan que je m’étais fixé.
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photo : Jean-Adrien Michel

Une stratégie décidée en amont

Ce style de parcours je ne le connaissais pas. Hormis à travers une reconnaissance effectuée quelques semaines auparavant avec Jean-Adrien Michel.

Il me semblait donc évident que je ne pouvais pas définir les mêmes objectifs que sur le trails bretons auxquels j’avais eu l’habitude de participer jusqu’à là. Partant de ce constat j’en ai choisi deux qui étaient clairs et cohérents : finir la course d’une part, et adopter la meilleure gestion possible pour ne pas trop subir le profil.

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Les kilomètres verticaux, les longues descentes et l’altitude étaient quelquechose de totalement nouveau pour moi, et je ne savais pas encore comment mon corps allaient encaisser la charge et ces nouvelles sensations dans l’intensité d’une compétition.

J’ai donc réalisé une première partie très sage, qui m’aura emmené jusqu’au 19ème kilomètre et son ravitaillement, avant d’attaquer le tant redouté Col du Moretan.

Face à l’imprévu

Le petit jour se leva. Ma frontale céda sa place pour ma casquette, ce fût le moment de me lancer à l’assaut d’une partie très minérale, très technique, voir parfois dangereuse qui m’emmènera, si tout va bien, jusqu’au 60ème kilomètre.

Avant d’y arriver, il aura donc fallu grimper le « juge de paix » comme le dira Renaud Rouanet second de l’Intégrale (149km), à savoir le Moretan et ses 700 mètres de dénivelé positif. Je savais déjà ce qui m’attendait l’ayant gravi quelques semaines auparavant lors d’un entraînement.

Cette première étape se passera plutôt bien, même avec ma technique peu académique du « 4 pattes » comme me le diront certains coureurs étonnés que je n’ai pas de bâtons.

Arriva ensuite la seconde partie des festivités et la longue descente qui s’en suit empruntant tout d’abord une partie glacée, un sentier très accidenté puis des champs de cailloux.

Et c’est là qu’un évènement imprévu est survenu. Les chaussures mouillées, lors d’un appui j’ai glissé et suis tombé sur ma côte gauche. Une terrible douleur m’envahira, mais hors de question d’arrêter. J’apprendrai après la course qu’elle est fêlée. Nous en étions au 25ème kilomètre. Il en restait 62.

Prendre son temps pour mieux repartir

Tout en serrant les dents avec une douleur qui se réveillera à chaque relance sur les 2-3 premières foulées j’ai rejoint tranquillement, et pas trop attaqué sinon, le ravitaillement de Super Collet au kilomètre 39. Il fut important car représentant plus ou moins la mi course avec déjà 3300 mètres de dénivelé positif avalés. Ce fût aussi à ce moment que j’ai pu récupérer mon sac d’allègement.

En effet, je suis parti sans assistance sur cette épreuve, Émilie et les filles n’ayant pas pu m’accompagner. Une difficulté supplémentaire pour moi bien sûr, mais aussi un bon moyen d’évoluer en autonomie, ce qui sera peut-être l’avenir de beaucoup de courses du futur.

Quoiqu’il en soit je décida à ce moment là de prendre mon temps. De changer mes chaussettes et chaussures car de grosses ampoules avaient commencé à m’attaquer. De passer à plus d’amorti. Et également de me recharger en nourriture avant d’attaquer la seconde moitié du parcours.

Au bout d’une vingtaine de minutes, après m’être également bien restauré, je suis alors reparti afin de me diriger vers Val Pelouse (kilomètre 60), lieu qui marquera la fin de la partie plus que technique du tracé.

Ce fût aussi à ce ravitaillement que j’ai vu pas mal de participants abandonner. Et nombre d’entre eux confesser « c’est plus dur que le Grand Raid« . C’est idiot, mais ces petites phrases m’auront mis du baume au coeur et rajouté de l’énergie pour la suite.
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photo : Jean-Adrien Michel

Des chutes et encore des chutes

Le parrain de l’épreuve Sébastien Chaigneau dira que l’Échappée Belle « est terrible car dès qu’on ne regarde plus le sentier, on tombe ». Ce tracé demande effectivement une concentration maximale et continue, ce qui est très épuisant au fur et à mesure des heures passantes.

Et j’ai donc dû beaucoup manquer de concentration sur cette portion, chutant à de nombreuses reprises. Fort heureusement, aucune n’aggravera ma douleur costale toujours bien présente.

C’est aussi sur cet intervalle que nous avons effectué la très difficile ascension du Col d’Arpingon. Une section très raide et éreintante après 50 kilomètres de course.

Mais à force d’efforts, et sans doute un peu de mental, je suis arrivé à Val Pelouse avec quasiment 2 heures d’avance sur mes prévisions. Et surtout avec toujours un peu de fraîcheur. Jusqu’à là, et ça sera le cas jusqu’à la fin, je n’aurais pas connu de moments « dans le dur » comme on aime les nommer.

Une fin plus familière

Hormis une bonne dose de dénivelé positif et négatif restante, le terrain, comme annoncé me sera beaucoup plus familier maintenant. Fini les cailloux mal rangés. J’ai donc pu « dérouler ». Enfin, avec les moyens qui étaient les miens après 60 bornes, une côte douloureuse et des ampoules qui me rappellaient à chaque foulée leur présence. Mais je me sentais bien.

Ce fût malheureusement moins le cas de Mimmi Kotka que je croisa arrêtée à 20 kilomètres de l’arrivée. Je lui glissa quelques mots d’encouragements comme sans doute bon nombre de coureurs, mais elle ne repartira pas. Ce fait illustre pour moi à nouveau la difficulté du pari que j’étais en train de réussir.

J’ai alors clôturé le parcours en continuant sur mon postulat de départ. À savoir gérer mon effort pour aller sonner la cloche à Aiguebelle.

16 heures et 8 minutes après mes premiers pas sur cette Traversée Nord j’ai franchi la ligne d’arrivée. Soit avec 2 heures d’avance sur le temps « raisonnable » que je m’étais fixé. Je ne connaissais pas encore ma position. Je ne m’en étais pas du tout occupé tout au long de la course. L’objectif n’étant pas là pour une fois.

C’est alors que j’ai découvert une 26ème place, un classement qui me satisfait assez à ce jour pour une première expérience en montagne. Sachant que comme le dit Diego Alarcon, mon entraîneur, « il y a course de montagne et course de montagne ». Et clairement celle-ci se classe dans la 2ème catégorie !

 

My trail friends.

// 👟Chaussures : Altra Timp 2 & Olympus 3.5 //

// 👕Textile : Altra (équipement Team Red Altra) //

// 🎒Sac : Patagonia Slope Runner 8L //

// 🧦Chaussettes : Stance //

// 🔦Frontale : Petzl Nao+ //

// 🍫Nutrition : Baouw //

// 🥤 Boisson isotonique : Hydrascore //

// ⌚️Montre : Garmin Fenix 5 //